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Affouragement en vert et robot Trois éleveurs, trois stratégies, trois questions

Pourquoi avez-vous choisi l’affouragement en vert ? Parvenez-vous à réaliser des économies de correcteur azoté ? L’organisation du travail est-elle compliquée ? Ces trois questions ont été posées aux trois éleveurs que la rédaction a rencontrés durant le printemps.

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Gaec de la Bellegarde à Ommonville-la-Petite (50)

3 associés

900.000 litres, 110 Prim’holstein à traire, 50 charolaises, taurillons

2 robots Delaval Vms

55 ha de maïs, 95 ha de prairies dont 4 ha d’accessibles. Parcellaire bocager très éclaté (65 ilots Pac)

Accès au pâturage : 3,6 ares / VL

Affouragement en vert : 8 mois par an. 650 kg MS d’herbe/jour

Equipement : remorque faucheuse-autochargeuse Jeulin Pales 400 de 24 m3

Gaec de la Ruette, à Ommonville-la-Petite (50) 

3 associés

1,45 millions de litres, 140 Prim’holstein à traire

2 robots Lely Astronaut

40 ha de maïs, 115 ha de prairie

Accès au pâturage : 0 ares / VL

Affouragement en vert : 6 mois par an

Equipement : faucheuse frontale + remorque autochargeuse distributrice Schuitmaker 35 m3 réhaussable.

Gaec de Bival, à Biville (50)

4 associés

600.000 litres, 100 normandes à traire

2 robots Lely Astronaut

35 ha de maïs et 70 ha d’herbe, dont 10ha facilement accessibles

Accès au pâturage : 15 ares/VL

Affouragement en vert : 3 mois par an en été

Equipement : récolteuse trainée à fléau + remorque distributrice 12m3


Pourquoi avez-vous choisi l’affouragement en vert ?

Jérome Chardot (Gaec de la Ruette) : En 2012, la récolte de maïs a été très mauvaise et nous avons manqué de fourrage en 2013. La ration était composée à 2/3 de maïs et 1/3 d’ensilage d’herbe. Nous avons alors choisi de semer davantage d’herbe et de réduire la part de maïs dans la ration, à la fois pour gagner en sécurité fourragère et en autonomie protéique. Il nous est impossible de faire pâturer nos 140 vaches, d’autant que nos deux robots de traite sont à saturation. Nous affourageons en vert depuis un an grâce à l’achat de matériels adaptés : une faucheuse frontale avec une remorque distributrice de grande capacité (35 m3) qui a remplacé notre vieille mélangeuse. Elle nous est très utile pour récolter nous-mêmes 30 hectares d’ensilage d’herbe sans avoir recours à une Eta.

Benoît Duval (Gaec de la Bellegarde) : Notre situation est assez similaire. Avant l’investissement dans les robots il y a un an et demi, l’herbe pâturée représentait la moitié de la ration au printemps. Aujourd’hui, le troupeau de 110 vaches n’a accès qu’à 4 ha de promenade. Néanmoins, depuis que nous sommes passés à l’affouragement en vert, nous valorisons mieux l’herbe. Et étonnamment, nos vaches n’ont jamais mangé autant d’herbe qu’aujourd’hui.

Denis Bienvenu (Gaec de Bival) : Pour moi, l’affouragement en vert est une solution d’appoint durant les mois d’été, lorsque les pâtures accessibles aux vaches ne suffisent plus. Cela nous permet d’allonger de trois mois la période où les vaches peuvent manger de la verdure. Pour affourager quelques semaines dans l’année, notre vieille récolteuse à fléaux associée à une remorque distributrice fait amplement l’affaire.

Voyez-vous un impact sur la santé du troupeau ?

Jérome Chardot (Gaec de la Ruette) : Mes vaches ne sortent jamais et c’est évident que l’herbe fraîche leur fait du bien, d’ailleurs il faut voir comment elles se pressent aux cornadis dès qu’elles sentent l’odeur de l’herbe coupée ! Au printemps dernier, l’apport d’herbe a permis de faire baisser les mammites ; le nombre de cellules est passé de 170 à 120.000 cel/ml, bien que le taux d’urée dans le lait monte facilement à 350 mg/l.

Benoît Duval (Gaec de la Bellegarde) : l’avantage de l’affouragement en vert, c’est qu’il n’y a pas de refus à l’auge et la production est plus stable qu’au pâturage. En traite robotisée, l’apport d’herbe amène du mouvement dans le bâtiment et incite les vaches à se lever et à aller se faire traire. Par ailleurs, l’affouragement en herbe fraîche limite considérablement le risque de butyriques dans le lait contrairement à l’ensilage d’herbe qui amène régulièrement un peu de terre dans le silo.

Parvenez-vous à faire des économies de correcteur azoté ?

Jérome Chardot (Gaec de la Ruette) : Il faut apprendre à bien gérer une grande quantité d’herbe et à doser le correcteur en fonction des parcelles et du stade de fauche, cela peut varier de 1,5 à 2 kilos de concentré selon les espèces et la qualité de l’herbe. En général, au printemps, la ration à l’auge est composée de 4 kg MS de maïs, 15 kg MS d’herbe, 1 kg de paille et 1 g de correcteur. Notre objectif est de mettre le minimum de correcteur à l’auge mais pour l’instant, nous n'avons pas encore économisé beaucoup de grammes de concentré par litre de lait.

Benoît Duval (Gaec de la Bellegarde) : C’est évident que l’herbe coûte moins cher que le maïs. D’avril à juillet, 40 % de la ration est apportée par l’affouragement. Si l’on parvient à baisser le concentré de 2 kilos par vache pendant quatre mois, cela représente une économie de 5.600 € à l’échelle du troupeau, c’est l’équivalent de l’amortissement de la remorque autochargeuse sur sept ans. Sur les prairies, les charges s’élèvent à 260 €/ha d’ammonitrate et 160 €/ha de semence pour au moins trois ans. Sur 12 ha de prairies, on économise environ 2.700 €/an de charges opérationnelles par rapport au maïs.

Par ailleurs, le choix des espèces fourragères est essentiel pour espérer économiser sur le coût alimentaire. Les prairies multi-espèces notamment avec des légumineuses comme le trèfle violet fonctionnent bien. Nous avons également semé du chou, du colza fourrager et de l’avoine brésilienne en dérobée : leurs fortes teneurs en matière azotée permet de réduire le concentré à l’automne.

L’organisation du travail est-elle compliquée ?

Jérome Chardot (Gaec de la Ruette) : Nous fauchons 30 ha destinés à l’affouragement en vert dans des parcelles de 0,5 à 4 ha, distantes de 1,5 km maximum. Nous faisons deux voyages d’herbe par jour avec 7 à 8 tonnes d’herbe par remorque. Il faut compter entre 1h et 1h30 par jour pour faucher, mettre le maïs par-dessus et distribuer. Vu le nombre d’animaux à nourrir, je pense que cela vaut le coup, néanmoins notre temps de travail total passé par vache me semble plutôt élevé. Un des inconvénients de l’affouragement en vert, c'est qu'il est impossible de s’arrêter de faucher une journée et le matériel ne doit pas tomber en panne.

Benoît Duval (Gaec de la Bellegarde) : Depuis l’arrivée des robots, nous passons moins de temps à la traite mais davantage à l’affouragement. Il faut compter environ une heure par jour et parfois plus pour les petites parcelles et celles éloignées. Nous fauchons à 7-8 km/h et il faut faire beaucoup de manœuvres, notamment dans les pentes. Je trouve que notre largeur de coupe de 2,10 mètres est aussi un facteur limitant. Néanmoins, le pâturage, cela prend aussi du temps, il faut être à deux pour emmener les vaches au pré, faire les clôtures, entretenir les prairies,…

Denis Bienvenu (Gaec de Bival) : Pour nous aussi, il faut compter environ une heure pour récolter 5 tonnes d’herbe avec notre ensileuse à fléaux de 1,5 m de large. Les parcelles sont éloignées de plus d’un kilomètre mais elles ne sont pas trop petites (2-4 ha), ce qui évite les manœuvres. Je trouve que pour trois mois par an, c’est assez supportable en termes de temps de travail.

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